Dans les rues animées de Niamey, la cuisine de rue met les bouchées doubles. L’odeur enivrante des grillades, des beignets et du thé sucré accompagne le quotidien des habitants. La Street Food, bien plus qu’une simple solution rapide pour se restaurer, fait partie intégrante de la vie urbaine, rythmant les journées et les soirées des habitants de Niamey. Elle est une culture profondément enracinée au Niger, où de nombreux habitants vivent de ce secteur informel.
« Hawrou koyo do, may Abintchi, may Chayi, may Nama » …voici comment sont appelés en langues locales les vendeurs de repas, viandes et thés à Niamey. Les habitants de la capitale nigérienne n’ont pas attendu l’essor de la street food pour se convertir dans ces cantines informelles qui proposent à toute heure de la journée des encas et des plats aussi savoureux que bon marché.
Les nigériens mangent chaque repas en famille et dans le même plat mais cette coutume a tendance à s’effriter. Au cours des dernières décennies, le phénomène s’est amplifié avec l’évolution des modes de vie et l’instauration de la journée continue dans les bureaux. « Traditionnellement, les nigériens mangent chaque repas en famille et dans le même plat mais cette coutume a tendance à s’effriter l’individualisation des habitudes alimentaires », explique Moussa un consommateur.
La street food est un phénomène devenu indissociable du mode de vie « niameyen ». Du goûter des enfants au repas nocturne des noceurs qui sortent de boîte de nuit, les restaurateurs de rue assurent de nombreux repas. La tendance s’est accélérée cette dernière décennie. « Il y a une vingtaine d’années, manger dans la rue était réservé aux jeunes hommes célibataires et aux ouvriers », explique le géographe Malick, qui travaille sur les modes de consommation alimentaire. Depuis, le public s’est élargi aux employés, aux cadres pressés, aux touristes et à la petite bourgeoisie. « Au point de faire reculer une vieille règle de politesse selon laquelle il est plutôt mal vu de manger dans la rue, à la vue de tous », souligne Malick.
Au détour d’un marché, sur un trottoir animé, les vendeurs ambulants proposent une cuisine accessible, variée et pleine de caractère. Brochettes de viande, poissons frits, beignets de farine, bouillies sucrées ou encore sandwichs locaux : l’offre est abondante et s’adapte à toutes les bourses. Le « tcheap », plat de riz au poisson ou à la viande, est souvent revisité en portions rapides, tandis que le « kilishi », viande séchée épicée, reste un incontournable apprécié des passants. « Ici, tout le monde trouve son compte. Avec 500 francs, on peut manger à sa faim », explique Aïssata, vendeuse de beignets au grand marché.

Sous son kiosque, Nasser s’active derrière sa plaque de cuisson fumante. Il coupe une baguette en deux, cuit une omelette, réchauffe des pommes de terre, ajoute du piment. Le tout, en une minute chrono. Midi approche et la file d’attente s’allonge. En plein cœur du quartier recasement de Niamey, tout le monde connaît « Nasser », le roi des sandwichs. « C’est le meilleur ! C’est propre, consistant et pas cher », résume Souleymane, un stagiaire de 24 ans qui ne manque jamais son sandwich de sa pause avant de retourner au bureau à côté.
Au-delà des assiettes, la street food est un espace de sociabilité. Autour d’un stand de brochettes ou d’un kiosque à thé, étudiants, travailleurs, familles et voyageurs se côtoient, échangent et partagent des moments simples. « Après les activités, on se retrouve souvent chez un vendeur de viande grillée. C’est notre petit rituel », confie un consommateur.
Pour d’autres, le thé reste un symbole fort : « Servir le thé, c’est plus qu’une boisson, c’est un moment de discussion et d’amitié », ajoute Ibrahim, vendeur ambulant de thé dans le quartier Yantala.
La street food représente également une véritable opportunité économique pour de nombreux jeunes et femmes de Niamey. Avec un investissement limité, ces petits commerces offrent des revenus quotidiens et contribuent à la vitalité de l’économie informelle de la ville. « J’ai commencé il y a environ 15 ans. C’est la vente de beignets qui m’a amené à la Mecque », raconte avec fierté « Hadjia », vendeuse de beignets très fréquentée au quartier plateau.

Si la street food séduit par son accessibilité et sa richesse culturelle, elle soulève aussi des défis liés à l’hygiène et à la sécurité alimentaire. Certains consommateurs expriment leurs inquiétudes. « Parfois, on ne sait pas vraiment dans quelles conditions la nourriture est préparée. Mais on n’a pas toujours le choix », souligne Fati, employée de bureau.
Mais malgré ces défis, la street food de Niamey reste un reflet vivant de la créativité et de la résilience de ses habitants.
Fatouma Akiné pour Niameyinfo.