En 2024, les dépenses militaires africaines ont progressé de 3 %, atteignant 52,1 milliards de dollars, selon le Stockholm International Peace Research Institute (Sipri). Parmi ces chiffres, l’Alliance des États du Sahel (AES), regroupant le Mali, le Burkina Faso et le Niger, se distingue par une accélération notable de son réarmement.
Entre 2021 et 2024, le Burkina Faso a doublé ses dépenses militaires (+108 %), tandis que le Niger a enregistré une hausse de 56 % sur deux ans. Le Mali, quant à lui, a augmenté son budget de 38 % entre 2020 et 2024. Ces trois pays ont investi ensemble 2,4 milliards de dollars en 2024, un chiffre modeste face aux grandes puissances du Maghreb, mais significatif au vu de leurs économies fragiles.
Cette montée en puissance militaire reflète la volonté des régimes militaires de consolider leur autorité intérieure tout en affirmant leur indépendance vis-à-vis des anciennes puissances coloniales, notamment la France. Le départ des forces étrangères, notamment françaises et onusiennes, a ouvert la voie à des alliances avec des partenaires tels que la Russie et la Turquie.
Portée par une rhétorique souverainiste, l’AES met le renforcement militaire au cœur de sa stratégie. Les budgets alloués à la défense financent l’achat d’équipements, la formation des troupes et la lutte contre les menaces transfrontalières. Cependant, cette dynamique inquiète, particulièrement dans la sous-région sahélienne en proie à l’instabilité.
Alors que l’Afrique du Nord concentre la majorité des investissements militaires avec 30,2 milliards de dollars (58 % du total continental), le Sahel suit une trajectoire contrastée. Les régimes militaires de l’AES, consolidés par des coups d’État successifs entre 2021 et 2023, privilégient le militaire face à des défis économiques et sociaux pressants.
Cette militarisation accélérée pourrait, à court terme, renforcer la défense de ces États, mais à moyen terme, elle risque de compromettre les dépenses sociales essentielles. Dans des pays où les besoins en éducation, santé et infrastructures demeurent criards, cette stratégie soulève des questions sur sa viabilité et ses implications pour l’avenir.
Zeynabou Assane Moumouni pour Niameyinfo.