Farida Olembé (surnom) est une migrante camerounaise de 28 ans vivant au Niger depuis le mois de septembre 2019. Avec deux enfants, cette originaire de Muyuka, province au Sud-ouest du Cameroun devenu l’un des épicentres du conflit armé depuis deux ans avec son lot de conséquences (350.000 déplacés et plus de 2000 morts) a dû quitter son pays manu militari un beau jour. Aujourd’hui, celle qui attend un troisième bébé demande de l’asile au Niger. Suivez son histoire.
Bonjour Farida, comment se fait-il que vous vous retrouvez au Niger ?
Bonjour, merci de m’avoir donné la parole. Je suis au Niger depuis septembre 2019 pour problème de conflits dans la zone anglophone du Cameroun.
Nous vivions dans la zone francophone et on a tué mon papa qui était journaliste. C’est comme ça que nous avons trouvé refuge dans la zone anglophone et là aussi lorsque la crise a éclaté, j’ai eu peur de retourner dans la zone francophone déjà que mon grand frère y était retourné et il a été tué aussi.
Lorsque la crise a éclaté dans la zone anglophone, nous avons fui et nous nous sommes réfugiés dans la forêt pendant des semaines. De bonnes volontés nous ont récupéré de là et nous ont aidé à traverser la frontière et atteindre le Nigéria. Du Nigéria, une femme nous a récupéré et emmené dans une église qui nous a servi d’abri pendant un moment avant qu’on nous oriente au Bénin. Arrivé au Bénin, nous avons appris que notre cas est géré par le HCR (Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés) ici. C’est ainsi que je suis arrivé au Niger.
Quelles sont les actions que vous avez entreprises une fois arrivé au Niger ?
Je me suis rapprochée du HCR qui nous a logé dans une case de passage et qui nous prend en charge. J’ai introduit une demande d’asile et nous sommes dans l’attente de l’obtention d’un statut de réfugié.
Comment vivez-vous votre situation actuelle ?
Je peux vous assurer que ce n’est pas facile. Déjà que nous avons quitté notre pays manu militari sans l’avoir planifié, cela bouscule énormément ta vie. Ca a été un traumatisme pour nous que du jour au lendemain, l’on se retrouve portant ses bagages, affolé et en courant dans toutes les directions parce qu’on ne savait même pas où aller. Les ambazoniens (appellation donnée aux séparatistes qui veulent diviser la zone anglophone de celle francophone au Cameroun) se sont révoltés contre l’Etat camerounais. Donc, ils instaurent l’instabilité, ils pillent, ils volent, ils tuent, ils détruisent les maisons, c’est très bouleversant et nous sommes arrivés au Niger complètement traumatisés. L’Etat même est débordé face à cette situation et par faute de protection adéquate, nous étions obligés de fuir pour ne pas perdre nos vies. Actuellement, je cherche ma sœur, mon petit frère qui restent introuvables depuis l’éclatement de la guerre. Le mari de ma tante quant à lui a été tué, ils ont kidnappé mon cousin qui a réussi à se sauver par la suite. C’est là que nous avons décidé de fuir.
Mais ici au HCR, nous sommes pour le moment logé et nous avons une ration alimentaire qui nous permet de tenir.
D’accord, si vous obtenez l’asile, que comptez vous faire ?
J’ai arrêté mes études en classe de Première et je vendais des fruits à Muyuka avant l’éclatement de la crise. J’aimerais bien faire une formation en Informatique, Infographie pour me lancer dans le domaine professionnel afin de subvenir aux besoins de mes enfants.
Interview réalisée par Guevanis DOH, Consultant médias sur les questions migratoires